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Le rôle historique du dauphin, fils de Louis XV, né en 1729 et disparu prématurément en 1765, semble s’être limité à diriger l’éducation de Louis XVI et de ses frères. L’historiographie, en lui attribuant la responsabilité des insuffisances du dernier monarque de l’ancien régime, a développé le plus souvent le portrait d’un prince retiré et aux moeurs bourgeoises, chef d’un parti dévot crispé sur les principes de l’absolutisme, protecteur du clergé et particulièrement de la Compagnie de Jésus, adversaire résolu de l’Encyclopédie et des Philosophes. Pourtant, depuis sa mort jusqu’aux années 1780, une telle représentation ne fit pas l’unanimité : orateurs et panégyristes le campèrent tour à tour en prince éclairé en phase avec l’esprit de son temps ou en défenseur sincère de la tradition. En conséquence, l’historien doit commencer par déconstruire les images hagiographiques successives qui ont enveloppé sa mémoire, pour redécouvrir, malgré le secret dans lequel il s’ensevelit en faisant brûler méthodiquement ses papiers avant de disparaître, et malgré l’entreprise de propagande qui tenta de le récupérer, l’acteur discret mais attentif de la politique royale, sur les marches du trône et aux côtés du roi, l’homme de foi et de culture confronté au tournant des Lumières au moment où il commence à occuper une place de poids dans le système monarchique.