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L’histoire moderne et contemporaine du Moyen-Orient a été marquée par des bouleversements démographiques et politiques, au centre desquels se trouve le développement des Etats sur un modèle d’Etat-nation. L’histoire des missions dans la région, longtemps dominée par une histoire internaliste héroïque ou par une légende noire de diffusion des influences coloniales européennes, s’est progressivement appropriée, au cours des dernières décennies, les mécanismes complexes de la formation de ces nouvelles structures de pouvoir. Ce numéro est l’occasion de faire avancer la réflexion sur une question épineuse soulevée par l’historiographie : celle des rapports entre indigénisation des Eglises consolidées par les missionnaires et formation nationale au sortir d’un ordre impérial, celui des Ottomans.L’arabisation est une question sensible de l’histoire des communautés chrétiennes du Moyen-Orient au vingtième siècle, qui a entraîné des développements centrifuges dans l’organisation des Eglises. L’aborder à travers l’activité des missionnaires, en butte aux interventions récurrentes des autorités locales, conduit à rappeler qu’il n’est d’arabisation que dans des jeux de pouvoir qui dépassent les frontières communautaires.. L’arabisation est une question d’hommes, de langue et de culture. C’est à la fois une exigence interne, dans le recrutement du clergé, dans les évolutions de la liturgie et dans la conception de la pastorale, et une exigence externe, liée à la préoccupation constante des autorités civiles à l’égard de l’activité (notamment pédagogique) des missionnaires et de la place des communautés chrétiennes dans l’organisation des sociétés. Les contributions à ce numéro visent à éclairer tant le devenir des Eglises de fondation missionnaire, qui s’approprient le nationalisme arabe, que la complexité des transformations sociales induites par le processus à l’échelle des sociétés moyen-orientales dans leur globalité, au-delà du cas des seules Eglises dites orientales. Sont abordés ici: l’évolution de l’Eglise melkite en Palestine mandataire, les rapports entre le Vatican et les Eglises orientales dans le mandat français, l’influence du « réveil culturel arabe » chez les Salésiens en Palestine et Transjordanie à la fin de l’époque ottomane et aux débuts du mandat britannique, la politique missionnaire du patriarcat grec-orthodoxe de Jérusalem dans les dernières années de la présence ottomane, les développements politiques autour de l’uniatisme en Jordanie et l’évolution des écoles salésiennes d’Egypte face au régime nassérien et au nationalisme arabe.