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Thérèse de l’Enfant-Jésus, carmélite de Lisieux (1873-1897), est la sainte catholique la plus populaire du XXe siècle. Sa notoriété fulgurante, fondée sur le succès d’un livre posthume, Histoire d’une âme (1898), sans cesse réédité depuis, doit aussi beaucoup à une réputation de sainte à miracles. »Après ma mort, je ferai tomber une pluie de roses ». Ce slogan, répété à satiété dans toutes les publications concernant Thérèse, fait écho à la parution, entre 1908 et 1926, d’annales miraculeuses intitulées Pluie de roses qui ont popularisé plus de 3 200 récits de miracles, fine fleur d’un surnaturel contemporain, sélectionné par le carmel de Lisieux à partir de dizaines de milliers de lettres reçues du monde entier. Ces récits, associés à une imagerie aussi séduisante que pieuse ainsi qu’à une diffusion de reliques en quantités quasi industrielles, constituent le substrat de cette étude.Comment expliquer que cette jeune femme morte inconnue à 24 ans au fond d’un petit carmel normand ait pu devenir, en deux décennies, un recours universel avant même sa canonisation (1925)? Voilà la question centrale du livre. Cette réflexion en entraîne d’autres: comment une dévotion se développe-t-elle à l’échelle mondiale, de manière aussi imprévue que subite? Quel sens donner à cet appétit de surnaturel qui s’empare des sociétés catholiques à l’orée du XXe siècle?Le succès de Thérèse de Lisieux est lié à une cohérence d’un message porté par une image, cohérence qui s’est construite peu à peu, au contact des nombreux témoignages, récits de miracles, zélateurs, ainsi que des impératifs de son procès de canonisation (1910-1925). Une cohérence cimentée par le surnaturel, lui-même activé par la confiance, elle-même renforcée par la spiritualité thérésienne: telle est la recette.Replacés au centre de la catholicité moderne, les miracles thérésiens révèlent également à quel point le catholicisme a joué un rôle central dans les mutations et les recompositions de la croyance à l’aube du XXe siècle.